COVID-19 : feu vert de la Commission européenne à la recapitalisation de Lufthansa

L'Europe
Available languages: EN

Le 25 juin 2020, la Commission européenne a autorisé la recapitalisation par l’État allemand de Deutsche Lufthansa AG (« DLH »), la société mère du groupe Lufthansa, à hauteur de 6 milliards EUR. Cette mesure est fondée sur l’Encadrement temporaire des aides d’État visant à soutenir l’économie dans le contexte de la flambée de COVID-19.

Cette mesure de soutien s’ajoute à la garantie publique de l’Allemagne pour un prêt de 3 milliards EUR en faveur de DLH et approuvée en mars 2020 par la Commission.

Après Condor (en octobre 2019), Flybe (en janvier 2020), Alitalia (en mars 2020), les compagnies aériennes françaises (en avril 2020), les compagnies aériennes suédoises (en avril 2020), easyJet, Volotea et Germanwings (décision d’incompatibilité des aides par le Tribunal de l’UE en juin 2020), Finnair (en juin 2020), et TAP (en juin 2020), c’est au tour de Deutsche Lufthansa d’obtenir le feu vert de la Commission sur une mesure de sauvetage dans le cadre de la crise du COVID-19.

Le 25 juin 2020, la Commission européenne a autorisé la recapitalisation de Deutsche Lufthansa AG (« DLH »), la société mère du groupe Lufthansa, par l’Allemagne pour un montant total de 6 milliards EUR. Cette mesure est fondée sur l’encadrement temporaire des aides d’État visant à soutenir l’économie dans le contexte de la flambée de COVID-19 du 20 mars 2020, tel que modifié le 3 avril et le 8 mai 2020.

Contexte de l’aide

Les restrictions de voyage mises en place dans le monde entier suite à la crise sanitaire du COVID-19 ont entraîné une forte diminution d’activités pour le secteur du transport aérien, y compris les transporteurs du groupe Lufthansa : Deutsche Lufthansa, Swiss International, Brussels Airlines, Austrian Airlines, Air Dolomiti, Eurowings, Germanwings, Edelweiss Air et SunExpress Deutschland.

Le soutien de l’État allemand envers DLH n’est pas une surprise. Des discussions entre la compagnie et l’État en cours depuis le début de la pandémie ont été abondamment relayées par la presse. La compagnie a un rôle majeur pour l’économie allemande et assure des services de connectivité essentiels aux niveaux national et international. Son fret aérien contribue également au commerce extérieur offrant une économie d’exportation à l’Allemagne et garantissant un flux régulier de marchandises pour tous les citoyens en ces temps difficiles.

La mesure d’aide

La mesure de recapitalisation s’inscrit dans un ensemble de mesures de soutien plus vaste pris dans le cadre de la crise sanitaire (et économique) actuelle. Ces mesures comprennent notamment une garantie d’État sur un prêt de 3 milliards EUR que l’Allemagne prévoyait d’accorder à DLH. Cette aide individuelle a été approuvée en mars 2020 par la Commission dans le cadre du régime allemand visant à soutenir l'économie durant la flambée de coronavirus.

La mesure de recapitalisation allemande notifiée à la Commission inclut :

  • une participation au capital de 300 millions EUR par la souscription de nouvelles actions par l’État, correspondant à 20 % du capital social de DLH ;
  • une participation tacite de 4,7 milliards EUR avec les caractéristiques d’un instrument de fonds propres non convertible ; et
  • une participation tacite d’1 milliard EUR qui a les caractéristiques d’un instrument d’emprunt convertible.

La recapitalisation sera financée par le Fonds de Stabilisation Économique (« Wirtschaftsstabilisierungsfond »), un fonds spécial créé par l’Allemagne afin d’apporter un soutien financier aux entreprises allemandes touchées par l’épidémie de coronavirus.

La Commission a autorisé la recapitalisation sur la base de l’Encadrement temporaire établissant (voir notre article du 7 avril 2020) les conditions suivantes relatives à :

  • la nécessité, le caractère approprié et à la taille de l’intervention ;
  • l’entrée de l’État dans le capital des entreprises et à sa rémunération pour l’investissement ;
  • la sortie de l’État du capital des entreprises concernées ;
  • la gouvernance : DLH est soumise à une interdiction de dividendes et de rachats d’actions jusqu’à la sortie complète de l’État du capital ;
  • l’interdiction des subventions croisées et interdiction d’acquisition ;
  • les engagements visant à préserver l’exercice d’une concurrence effective : à savoir la cession de jusqu’à 24 créneaux par jour dans les aéroports pivots de Francfort et de Munich et d’actifs supplémentaires connexes afin de permettre aux transporteurs concurrents de baser quatre aéronefs maximum dans chacun de ces aéroports ;
  • la transparence publique et information sur l’utilisation des aides reçues, y compris sur la manière dont ces aides soutiennent les activités de l’entreprise.

La Commission estime que la mesure de recapitalisation contribue à gérer l’impact économique de la crise sanitaire en permettant de restaurer la position dans le bilan et la liquidité de DLH, tout en maintenant les garanties nécessaires pour limiter les distorsions de concurrence.

Des aides suivies de près …

Ryanair a déjà annoncé son intention de contester la légalité de l’aide d’État en faveur de Lufthansa devant le Tribunal de l’Union européenne. La compagnie continue donc sur sa lancée de dénonciation des aides d’État accordées dans le cadre de la crise sanitaire du COVID-19. Plusieurs recours en annulation ont déjà été déposés. Elle poursuit son combat contre les compagnies aériennes « droguées aux aides d’État » (dixit Ryanair en mai 2020) ...

Il revient désormais au Tribunal de se prononcer à cet égard, sachant que la Commission dispose d’une marge de manœuvre importante à l’égard des conditions qu’elle souhaite imposer pour déclarer une aide compatible.