Création de la société d’économie mixte à opération unique

France

Référence : Loi n°2014-744 du 1er juillet 2014

La loi du 1er juillet 2014 crée un nouveau statut de société d’économie mixte à opération unique (SEMOP) et insère à cet effet de nouveaux articles L.1541-1 à L.1541-3 dans le Code général des collectivités territoriales.

Ce texte a pour origine une proposition parlementaire visant à créer un nouvel « instrument de gouvernance au service de l'action publique locale qui permet d'allier les valeurs de la gestion directe en redonnant à la collectivité la maîtrise de son service public et les atouts de la gestion déléguée en faisant appel aux compétences et à l'innovation d'un opérateur privé » (exposé des motifs de la proposition de loi).

Il transpose par ailleurs la possibilité admise par le droit de l'Union européenne de mettre en place des formules de « partenariats public-privé institutionnalisés » ("PPPI" : cf. communication interprétative de la Commission du 5 février 2008 et arrêt de la Cour de justice du 15 octobre 2009, C-196/08, Acoset), possibilité que le Conseil d'Etat avait considéré, dans un avis du 1er décembre 2009, comme méconnaissant les règles internes de la commande publique.

Désormais, une procédure unique de mise en concurrence va suffire pour:

  • sélectionner le ou les opérateurs économiques qui seront associés d’une société à capital mixte, public et privé ;
  • et pour attribuer à cette société future un contrat de la commande publique dont la passation serait, en dehors de cette hypothèse, soumise à une procédure d'attribution spécifique dans laquelle la SEM devrait être mise en concurrence avec les autres opérateurs potentiels.

A cet effet, le dossier de consultation des entreprises est complété d’un « document de préfiguration » de la SEMOP, détaillant les principales caractéristiques de la future société et le coût prévisionnel de l’opération du côté du pouvoir adjudicateur.

Les personnes publiques qui pourront recourir à la SEMOP sont les collectivités territoriales et leurs groupements (y compris les établissements publics de coopération intercommunale et les syndicats mixtes, selon la définition des groupements figurant désormais à l’article L. 5111-1 du Code général des collectivités territoriales, issue de la loi n°2014-58 du 27 janvier 2014). La loi prévoit que c'est une collectivité ou un groupement qui est à l'origine de la procédure et non plusieurs d'entre eux. La SEMOP est une société de projet qui passe un contrat avec cette collectivité ou ce groupement.

Le statut de la SEMOP est celui de la société anonyme, avec au moins un opérateur économique (par dérogation au droit commun, deux actionnaires suffisent). Par défaut, les règles relatives aux sociétés d’économie mixte s’appliquent également. La collectivité ou le groupement détient entre 34 et 85% du capital social et au moins 34% des voix dans les organes délibérants (pour disposer d'un droit de blocage). La part de l’ensemble des actionnaires opérateurs économiques ne peut être inférieure à 15%. Les statuts de la société reprennent le document de préfiguration.

Le contrat conclu – et corrélativement l'objet de la SEMOP – est doublement délimité. Il l'est en premier lieu par son objet qui doit concerner : soit une opération de logement ou d'aménagement, soit la gestion d'un service public, soit toute autre opération d'intérêt général, ces missions devant, bien sûr, ressortir aux compétences de la collectivité ou du groupement. Il l'est en second lieu par sa nature, dès lors que le nouvel article L. 1541-2 du Code général des collectivités territoriales énumère restrictivement les procédures de passation pouvant déboucher sur la conclusion du contrat : délégation de service public, concession de travaux, concession d’aménagement ou marché public. On ne peut que relever l’absence, dans cette énumération, des contrats de partenariat, lesquels figuraient dans la version initiale du texte. A cet égard, les travaux parlementaires au Sénat présentent la SEMOP comme « une forme renouvelée de partenariat public-privé, plus efficace et sécurisée que les PPP classiques » (séance du 11 décembre 2013). La réalité du caractère substituable du PPP et de la SEMOP laisse quelque peu dubitatif. Et on peut penser que la possibilité de conclure un bail emphytéotique administratif, expressément prévue par le nouveau texte, ne suffira pas à pallier cette absence dès lors que si le BEA constitue en réalité un contrat de partenariat, il doit être conclu selon la procédure afférente à ce type de contrat (cf. article R. 1311-1 du Code de général des collectivités territoriales, issu du décret n°2011-2065 du 30 décembre 2011). De même, un contrat confiant la réalisation de certains services à des opérateurs pourrait n'être ni un marché public ni une délégation de service public (cf. Trib. Conf., 7 avril 2014, n°3949, SEVP, qui paraît constituer la première pierre vers la reconnaissance de la notion de concession de service). Il y aura là aussi une lacune possible. Il est d'ailleurs permis de s'attendre à ce que la mise en pratique en relève d'autres, telles que celles relatives aux modalités de conclusion des contrats de sous-traitance de la SEMOP (au sens large), notamment avec ses actionnaires.