Document de travail de la Commission européenne sur les aides d’Etat et les rulings fiscaux

Belgique
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Les rulings fiscaux constituent l’une des priorités essentielle de la Commissaire européenne à la Concurrence, Margrethe Vestager, en matière de politique d’aides d’Etat.

La Commission européenne enquête sur les pratiques en matière de rulings fiscaux depuis juin 2013. Elle a tout d'abord lancé une enquête globale concernant les rulings intervenus dans tous les Etats membres entre 2010 et mi-2013. Dans ce cadre, la DG Concurrence a examiné plus d’un millier de rulings fiscaux et plus spécifiquement les rulings fiscaux ayant porté sur des accords de prix de transfert négociés avec des entreprises permettant de déterminer la base imposable d’une société faisant partie d’un groupe.

À la suite de cette enquête globale, la Commission a ouvert plusieurs procédures formelles d’examen afin de vérifier la conformité avec la réglementation européenne en matière d’aides d’Etat des rulings fiscaux accordés par l’Irlande (affaire Apple), le Luxembourg (affaires Fiat, Amazone et MacDonald), les Pays-Bas (affaire Starbucks) et la Belgique (système de décisions fiscales anticipées relatif aux ‘bénéfices excédentaires’).

Ces procédures ont conduit à trois décisions négatives dans les affaires Starbuck, Fiat et le système de décisions fiscales anticipées relatif aux ‘bénéfices excédentaires’. Les affaires Apple, Amazone et MacDonald sont toujours en cours. D’autres procédures suivront certainement.

La DG Concurrence a présenté le 3 juin 2016 un document de travail sur les aides d’Etat et les rulings fiscaux. Ce document de travail vise à résumer ses premières orientations sur les rulings fiscaux portant sur des prix de transfert.

Dans ses premières conclusions, la Commission a constaté que les pratiques des Etats membres diffèrent de manière significative en termes de quantité au cours de la période ayant fait l’objet de l’enquête globale. En effet, certains Etats membres ont émis chaque année des milliers de rulings fiscaux en faveur d’entreprises alors que cinq Etats membres (la Bulgarie, Croatie, Lettonie, Grèce et Slovénie) n’ont accordé aucun ruling fiscal portant sur des prix de transfert sur la même période.

En ce qui concerne la procédure, la plupart des Etats membres appliquent les lignes directrices procédurales prévues par la Communication de la Commission sur les prix de transfert dans le domaine de la prévention et du règlement des différends et concernant des lignes directrices relatives aux accords préalables sur les prix dans l’UE ainsi que les principes de l’OCDE applicables en matière de prix de transfert.

Cependant, la Commission constate dans ses enquêtes que certains accords sur les prix de transfert ne semblent pas refléter le principe du prix de pleine concurrence lorsque le résultat s’écarte manifestement d’une approximation fiable, fondée sur le marché. Il s’agit notamment régulièrement du cas des ruling fiscaux se rapportant à la rémunération de sociétés de financement faisant partie d’un groupe d’entreprises, par exemple la refacturation de coûts ou le paiement de droits de propriété intellectuelle au sein du même groupe.

La Commission met aussi en cause l’approbation de la déduction fiscale sur les paiements ou les charges entre les sociétés d’un groupe.

Dans son document de travail, la Commission annonce qu’elle concentrera ses moyens sur les affaires violant de manière manifeste le principe du prix en pleine concurrence.

Néanmoins, de nombreux fiscalistes critiquent vivement cette nouvelle approche en matière de réglementation européenne sur les aides d’Etat et rappellent à la DG Concurrence qu’elle ne peut agir comme un contrôleur fiscal européen à défaut d’une harmonisation de la fiscalité des Etats au niveau européen.

Relevons également que la Belgique a récemment intenté devant le Tribunal de l’Union européenne un recours en annulation à l’encontre de la décision de la Commission européenne sur le régime des bénéfices excédentaires et que le Tribunal devrait dès lors se prononcer sur la compétence et l'approche de la Commission à l’égard des rulings fiscaux.